Dejan Stosic (Université Toulouse Jean Jaurès & CLLE)
L’objectif de cette communication sera d’examiner l’interaction entre la valeur de manière et la catégorie de l’aspect, et plus précisément celle de l’Aktionsart (ou mode d’action, cf. Vetters 1996). Il s’agit d’un chantier qu’Estelle Moline et moi-même ouvrions ensemble au tout début 2020 en vue d’une proposition de communication à Chronos 14, qui finalement n’aura pas lieu ! L’intérêt d’Estelle Moline à cette question est cependant plus ancien, comme en témoigne un de ses textes de 2010, intitulé « Mode d’action et interprétation des adverbiaux de manière qu- », publié dans Cahiers Chronos. Pour rendre hommage à cette collègue et amie de longue date, je me propose de poursuivre cette réflexion.
Cette recherche trouve ses origines dans l’idée qu’il est nécessaire de vérifier empiriquement la prétendue attraction entre la manière et les procès par nature non bornés et saisis comme étant en cours de déroulement. Autrement dit, d’après plusieurs auteurs, il y aurait une compatibilité particulièrement remarquable entre la manière d’une part et les situations dynamique de nature atélique et/ou imperfective d’autre part (cf. entre autres Van de Velde 2009). La prétendue « épaisseur » propre à ce type d’éventualités est souvent considérée comme déterminante pour leur modification par la manière. Autant dire que les procès dépourvus de dynamisme comme les états ou réduits à une réalisation instantanée sont présentés comme de mauvais supports pour la valeur de manière.
Cette hypothèse est mise à l’épreuve d’un corpus clos extrait du roman L’Etoile errante de Le Clézio correspondant à 2/3 du texte et comportant 640 phrases et 70.000 mots, à l’aide d’une analyse qualitative et quantitative des données. A des fins de cette étude, j’ai relevé toutes les occurrences de verbes modifiés par un complément ou modifieur de manière au sens large du terme (cf. Moline & Stosic 2016), quelle que soit leur nature : adverbes (1), syntagmes prépositionnelles (2), constructions absolues (1), propositions participales ou subordonnées, etc.
1) Ils étaient vêtus pauvrement, et ils restaient auprès de leurs mères, assis sur des ballots de linge, l'air transi. (p. 85)
2) Esther répéta avec entêtement : « Elle n'est pas allée avec les Italiens, je le sais ». (p. 110)
J’ai ainsi pu répertorier environ 320 prédicats verbaux différents accompagnés d’un dépendant exprimant la manière, pour un total de 1092 occurrences. Le premier résultat important qui ressort de l'analyse est que les quatre types de procès du point de vue du mode d’action sont susceptibles d’être modifiés, y compris les états (ex. rester sans bouger). Ensuite, les données de mon corpus confirment l’hypothèse que les activités sont, en termes d’occurrences, des procès qui se prêtent le mieux à la modification par la manière (50%). Enfin, le troisième fait remarquable et assez surprenant, réside dans la présence massive dans le relevé de prédicats d’achèvement, qui représentent 34% d’occurrences analysées (ex. entrer les uns après les autres, partir à pied, demander humblement, se lever d’un seul coup).
En adoptant une démarche souvent utilisée par Estelle Moline dans ses travaux (cf. Moline 2009, 2013), je me propose dans ma communication d’examiner la combinatoire des prédicats d’achèvements avec des modifieurs et compléments de manière dans l’objectif d’esquisser une explication pour ces structures qui, bien que tout à fait naturelles, restent assez inattendues du point de vue théorique.
Références bibliographiques
Garey, H. (1957). Verbal Aspect in French. Language, 33(2), 91-110.
Moline E. (2009), Elle me parle comme une mitraillette. L’interprétation des adverbiaux de manière qu- : le cas de parler et des verbes de ‘manière de parler’. Langages, 175, 49-65.
Moline E. (2013), La meilleure façon de marcher. Compléments de manière et propriétés sémantiques du prédicat verbal : l’exemple de marcher. Scolia, 27, 97-117.
Moline, E., & Stosic, D. (2016). L'expression de la manière en français. Paris: Ophrys.
Van De Velde, D. (2009). Les adverbes de manière : propriétés inhérentes et propriétés héritées des prédicats verbaux. Langages, 175, 15-32.
Vendler, Z. (1957). Verbs and Times. Philosophical Review, 66, 143-160.
Verkuyl, H. (1972). On the compositional nature of the aspects. Dordrecht : Reidel.
Vetters, C. (1996). Temps, aspect et narration. Amsterdam-Atlanta: Rodopi.
Vuillaume, M. (1990). Grammaire temporelle des récits. Paris : Minuit.
Sylvie Vignes (Université Toulouse Jean Jaurès)
À en croire Italo Calvino, « étudier les zones de frontière de l’œuvre littéraire, c’est observer les modalités dans lesquelles l’opération littéraire comporte des réflexions qui vont au-delà de la littérature mais que seule la littérature peut exprimer. » L’enjeu est sans doute encore plus fort dans la seconde de ces zones, alors qu’approche le point final.
Les dernières lignes des romans du grand écrivain franco-grec qui nous a quittés l’an dernier, Vassilis Alexakis, se font volontiers gracieuses pirouettes au regard de l’horizon d’attente du lecteur et pieds de nez gentiment impertinents aux « conventions terminales » d’hier et d’aujourd’hui. Mais elles donnent simultanément raison à Italo Calvino par leur teneur existentielle. À les lire plus attentivement, on en vient en effet à penser doublement au titre d’un roman de Laurent Mauvignier où il est question de l’agonie d’un amour – Apprendre à finir –, tant la question du deuil y reste prégnante. Nous nous proposons d’étudier la manière dont les clausules alexakiennes, entre légèreté et profondeur, rétention et révélation, en viennent à dessiner une forme condensée d’autoportrait.
Mathilde Salles (Université de Caen & CRISCO)
Les noms généraux, sémantiquement pauvres et référentiellement polyvalents, sont parfois présentés comme particulièrement adaptés à la reprise anaphorique infidèle. Bien des contextes, néanmoins, ne se prêtent pas à une reprise par un nom général comme chose, personne ou individu d’un référent préalablement classifié. Les difficultés posées par de telles reprises ou les effets discursifs (souvent péjoratifs) qu’elles produisent sont liées à la déclassification du référent qu’elles impliquent. Les noms généraux se distinguent en effet des autres noms superordonnés par leur non-classifiance. Cette propriété les rapproche en revanche des noms de qualité (au sens de Milner), noms qui apparaissent au plus haut du continuum de généralité dans certains exemples proposés par Halliday & Hasan.
Silvia Adler (Université Bar-Ilan) & Il-Il Yatziv-Malibert (INALCO)
En octobre 2019, lors d’un colloque tenu à Strasbourg, Estelle Moline nous avait sollicitées dans l’intention de prendre part à un numéro spécial qui allait être dédié à l’étude typologique et comparative de chose et ses équivalents dans diverses langues. Ce projet est malheureusement resté inachevé. Dans cette communication, nous souhaitons donner corps à cette belle initiative, mettant en exergue le cas de l’hébreu contemporain, langue qu’Estelle nous avait demandé d’explorer.
Fondée sur le corpus COSIH de l'hébreu oral informel[1], notre étude vise ainsi à mettre en lumière le fonctionnement de chose (en hébreu : davar, nom masculin) et sporadiquement aussi de quelque chose (en hébreu : mashehou, souvent prononcé mashou) dans l’hébreu oral spontané. Nous espérons, à travers le cas de l’hébreu, contribuer à la littérature existante sur les noms généraux et les noms sous-spécifiés[2] dont fait partie chose, et notamment examiner la puissance syntaxique et pragmatique de ce lexème en apparence ‘insignifiant’.
Les études déjà conduites sur chose en français (Blanche-Benveniste, 1986 ; Kleiber 1987, 1994 ; Willems, 1998 ; Mihatsch, 2006 ; Benninger, 2014) nous aideront à comprendre les affinités aussi bien que les idiosyncrasies de davar par rapport à son homologue français. D’autre part, les travaux de Schmid (2000) et de Flowerdew & Forest (2015), entre autres, nous permettront d’étayer le fonctionnement de davar en tant que nom général ou nom sous-spécifié en construction.
Références
Adler, Silvia & Moline, Estelle (2018). « Les noms généraux : présentation », Langue française 2018/2 (N° 198), 5-18.
Benninger, Céline (2014). « La question de la définition sémantique du nom atypique chose », Travaux de linguistique, 69, 35-55.
Blanche-Benveniste, Claire (1986). « Une chose dans la syntaxe verbale », Recherches sur le français parlé, 7, 141-168.
Flowerdew J. & Forest R. (2015). Signalling Nouns in English : A Corpus-based Discourse Approach, Cambridge University Press.
Kleiber G. (1987). « Mais à quoi sert donc le mot ‘chose’ ? Une situation paradoxale », Langue française, 73, 109-128.
Kleiber G. (1994). « Une leçon de CHOSE : sur le statut sémantico-référentiel du mot CHOSE », Nominales. Essais de sémantique référentielle, Paris, A. Colin : 12-28.
Mihatsch W. (2006). « Machin, truc, chose : la naissance de marqueurs pragmatiques », in Drescher M. & Frank-Job (éds), Les marqueurs discursifs dans les langues romanes. Approches discursives et méthodologiques, Frankurt am Main, Berlin, N_Bern, Bruxelles, New York, Orford, Wien, Peter Lang : 153-172.
Schmid H.-J. (2000). English Abstract Nouns as Conceptual shells, New York: Mouton de Gruyter.
Willems D. (1998). « Un petit rien sur quelque chose », in Pierrard, M. et al. (eds), La ligne claire. De la linguistique à la grammaire. Mélanges offerts à Marc Wilmet, Paris/Louvain, De Boeck Supérieur, Coll. Champs Linguistiques. pp. 137-145.
[1] The corpus of Spoken Israeli Hebrew, http://cosih.com.
[2] Sujet abordé par Estelle Moline en 2018 (voir numéro 198 de Langue Française édité par Adler & Moline, 2018).
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Véronique Lenepveu (Université de Caen & CRISCO)
Il est évident que (p) fait partie des formes impersonnelles qui, en prenant la proposition pour argument, expriment une modalité à statut de métaprédicat (Gosselin, 2010). Après avoir rappelé les caractéristiques syntaxiques de cette forme impersonnelle (Picabia,1978 ; Riegel, 1985 ; Gaatone 1987), nous identifierons sa valeur modale en tant que méta-prédicat. Bien que il est évident que p possède par défaut la propriété d’implicativité (il est évident que p implique p) , nous argumenterons l’hypothèse selon laquelle, en français contemporain, il est évident que établit une mise en relation de la validation de la proposition avec la subjectivité, et correspond au plus haut degré de certitude sous la modalité épistémique. Cependant, cette subjectivité n’est ni purement individuelle (ce qui est vrai pour le sujet) ni collective (ce qui est vrai pour la plupart ou un ensemble de sujets), mais relève de ce qu’on pourrait appeler la « subjectivité impersonnelle » définie comme ce qui est vraie pour n’importe quel sujet.
Gaétane Dostie (Université de Sherbrooke)
Dans le texte introductif au numéro thématique de la revue Travaux de linguistique (2009, vol. 54, no 1) consacré aux divers emplois de comment en français contemporain, Estelle Moline mentionne au passage un emploi où le marqueur « interroge sur la quantité » (p. 8). L’auteure remercie, en note de bas de page, Pierre Larrivée qui lui a signalé « cette formule tout à fait banale en français québécois » (p. 15). Bien que comment-quantitatif (désormais comment-Q) soit typique des emplois interrogatifs, comme en (1), il figure aussi dans des énoncés assertifs, comme en (2), où le locuteur se réfère à une quantité indéfinie. Dans ces contextes, comment-Q commute avec combien-quantitatif (combien-Q).
(1) Comment ça coûte ? (Moline 2009, p. 8)
(2) elle voulait savoir comment t'avais d'argent
(Corpus de français parlé au Québec ou CFPQ, sous-corpus 21, p. 22)
L’utilisation de comment-Q n’est pas récente. À titre d’exemple, S. Clapin en fait état dans son Dictionnaire canadien-français […] paru en 1894. De nos jours, comment-Q s’ajoute à une longue liste d’emplois proscrits par la norme sociale, comme en fait foi la rubrique « comment versus combien » de la Banque de dépannage linguistique de l’Office québécois de la langue française (en ligne).
L’exposé proposera un survol des différents contextes d’emplois de comment-Q et combien-Q afin, ultimement, de déterminer si ces deux marqueurs sont de parfaits synonymes au plan conceptuel lorsqu’ils renvoient à la quantité. Pour ce faire, le Corpus de français parlé au Québec (CFPQ) sera exploité. Ce corpus collige des conversations à bâtons rompus, tenues entre locuteurs, cognitivement et socio-affectivement proches. Les enregistrements, effectués sur support audiovisuel, totalisent environ 47 heures. Ils ont été réalisés entre 2006 et 2019 dans diverses régions du Québec auprès de 112 locuteurs nés entre 1910 et 1990. Cet empan temporel, relativement large, permettra incidemment de vérifier si des facteurs générationnels sont de nature à influencer l’usage de comment-Q.
D’un point de vue intrasystémique, nous examinerons :
- la polysémie de comment et combien[1], telle qu’on peut l’entrevoir à travers les données du CFPQ. L’objectif sera de déterminer la fréquence d’usage du sens quantitatif associé à ces deux marqueurs, eu égard aux autres sens qu’ils servent par ailleurs à exprimer ;
- les structures syntaxiques dans lesquelles comment-Q et combien-Q apparaissent (p. ex. comment de N, comment que P, comment P, etc.) ;
- les profils combinatoires respectifs de comment-Q et combien-Q. Seront ici considérés :
o les verbes sur lesquels comment-Q et combien-Q portent (p. ex. coûter, payer, avoir, faire, etc.) ;
o les catégories sémantiques auxquelles ces marqueurs renvoient (nombre, temps, prix, etc.) ;
- les actes de langage accomplis par les énoncés dans lesquels comment-Q et combien-Q figurent (questions hétéro-adressées, questions auto-adressées, questions rhétoriques, assertions…).
Il a souvent été dit que la synonymie exacte était rare, voire impossible à rencontrer dans un même style communicatif (pour une synthèse de la question, voir entre autres Dostie 2018). Il sera intéressant d’établir si la paire « comment-Q / combien-Q » invite à la nuance, à l’instar d’autres cas de figure repérés dans le domaine grammatical et discursif (p. ex. Dostie 2022, Dostie à paraître).
Références
Banque de dépannage linguistique, Office québécois de la langue française, Gouvernement du Québec. https://bdl.oqlf.gouv.qc.ca/bdl/gabarit_bdl.asp?id=4052 (Consulté le 18 octobre 2022)
Clapin, Sylva, 1894, Dictionnaire canadien-français ou lexique-glossaire des mots, expressions et locutions ne se trouvant pas dans les dictionnaires courants et dont l'usage appartient surtout aux Canadiens-français, Montréal-Boston. (En ligne sur Canadiana : https://www.canadiana.ca/view/oocihm.03198/3)
Corpus de français parlé au Québec (CFPQ), 2006-2019, sous la direction de Gaétane Dostie, Crifuq, Université de Sherbrooke. (En ligne : https://applis.flsh.usherbrooke.ca/cfpq/)
Dostie, Gaétane, 2018, Synonymie et marqueurs de haut degré. Sens conceptuel, sens associatif, polysémie, Paris, Classiques Garnier.
Dostie, Gaétane, 2022 « Une ou deux périphrases à valeur progressive en français québécois de tous les jours ? Être après V-inf et être en train de V-inf », Langages, 226 : 2, p. 83-98.
Dostie, Gaétane, à paraître, « La construction < DÉT poss. 1re pers. sing. + N évoquant le divin >. Mon dieu, mon doux, ma foi et my god dans les interactions à l’oral », Lingvisticae Investigationes, 20 p.
Iordanskaja, Lidia et Igor Mel’čuk, 2017, Le mot français dans le lexique et dans la phrase, Paris : Hermann.
Moline, Estelle, 2009. « Panorama des emplois de comment en français contemporain », Travaux de linguistique, 58 :1, p. 7-17.
[1] Les lettres majuscules renvoient aux vocables, c’est-à-dire aux mots polysémiques, indépendamment des acceptions particulières ou lexies (Iordanskaja et Mel’čuk I. 2017).
Daciana Vlad (Université d’Oradea)
Nous étudierons dans une perspective contrastive (français-roumain) des phrasèmes impliqués dans l’expression du désaccord propres aux interactions orales, où le désaccord vise souvent la manière de dire de l’interlocuteur. Ce sont des formulations plus ou moins conventionnelles qui servent à faire une évaluation négative du discours de l’interlocuteur, en le qualifiant d’invraisemblable, faux, inacceptable, etc.:
Fr. Tu en rajoutes; Qu’est-ce que tu me chantes là?! ; Sans blague!; Arrête de raconter des histoires!
Roum. Le cam înflorești; Ce tot îndrugi acolo?; Nu mă-nnebuni!; Lasă poveștile!
Notre corpus, constitué principalement à partir de Frantext et du dictionnaire de Gancz et al. (1999), comprend des formes qui peuvent être regroupées dans quatre catégories: structures assertives, interrogatives, exclamatives, injonctives.
Nous mettrons en évidence l’hétérogénéité des réalisations phrastiques des formulations analysées et examinerons les types de correspondances qui s’établissent entre les phrasèmes français et roumains en nous intéressant surtout au cas de correspondance indirecte (ex.: fr. énoncé impératif: Laisse-moi rire! à roum. énoncé assertif: Mă faci să râd ‘Tu me fais rire’). Nous discuterons en détail les divergences de structuration de ces phrasèmes dans les deux langues.
L’examen de leur degré de figement nous permettra d’isoler des cas de figement intégral (fr. N’importe quoi!; roum. Haida de!) et des constructions semi-figées (fr. C’est des contes/des histoires, ça!; roum. Povești!/Basme!). L’analyse du fonctionnement sémantico-pragmatique de ces tours mettra en évidence leur sémantique « agonale »: ils expriment différentes formes de rejet du discours autre, accompagné de réactions subjectives du type doute, incrédulité, indignation, etc. Nous aurons montré que les constructions étudiées varient d’une langue à l’autre, mais leur sens correspond à des universaux pragmatiques, à savoir des stratégies discursives conventionnelles qui relèvent de la pragmatique interculturelle.
Références
Galatanu, O. (2021), « Les marqueurs illocutionnaires holophrastiques du désaccord: sémantisme et polyphonie fonctionnelle d’une classe de phraséologismes pragmatiques », Lexique, 29, p. 75-95.
Gancz, A., Franchon, M.-C., Gancz, M. (1999), Ghid român-francez al actelor de vorbire, Bucureşti, Editura Corint.
López Simó, M. (2019), « Classement d’un sous-ensemble de phrasèmes en discours : les formules conversationnelles », Fraseologismi in discorso, PHRASIS | Rivista di studi fraseologici e paremiologici, 3, p. 216-231 [en ligne].
Pop, L. (2010), « Mărci lingvistice şi orientare discursivă », in Zafiu, R., Dragomirescu, A., Nicolae, A. (ed.), Limba română. Controverse, delimitări, noi ipoteze. Actele celui de-al 9-lea Colocviu al catedrei de limba română, vol. II, Bucureşti, Editura Universităţii din Bucureşti, 225-241.
Tutin, A. (2020), « Tu parles! Et puis quoi encore! Phrases préfabriquées à fonction expressive dans les dictionnaires français », SHS Web of Conferences, 78, 7e Congrès Mondial de Linguistique Française, DOI: https://doi.org/10.1051/shsconf/20207805013.
Ţenchea, M. (2006), Noms, verbes, prépositions : études de linguistique française et roumaine, Timişoara, Mirton & Hestia, 72-98 (chap. « Structures verbales impliquées dans la reprise polémique en français »).
Vlad, D. (2017), Pour une « grammaire » du polémique. Étude des marqueurs d’un régime discursif agonal, Cluj-Napoca / Oradea, Presa Universitară Clujeană & Editura Universităţii din Oradea.
Eric Gilbert (Université de Caen & CRISCO)
Be to est une combinaison qui est généralement considérée comme une périphrase figée ou un idiome. Cette construction grammaticalisée, qui relève du domaine de la modalité, offre une large palette d’interprétations allant de l’arrangement planifié (Trump is to deliver a speech in Warsaw during a brief visit Thursday) à la possibilité (A list of the persons interviewed is to be found in the attachments) en passant par la destinée (She settled in the New York City area, where she was to spend more than 60 years), l’ordre (You are to come with me! That's an order!), la volonté ou l’intention (If he is to gain the acclamation of the Arab world, he must humiliate America). Nous essaierons de montrer que, si l’on souhaite rendre compte de ce riche éventail sémantique, il convient de ne pas appréhender cette combinaison en bloc, mais au contraire d’adopter une approche compositionnelle, qui prenne en compte, au-delà de leur évidente solidarité, l’apport respectif de chacun de ses constituants. Dans cette étude, qui s’inscrit dans le cadre de la Théorie des Opérations Enonciatives élaborée par A. Culioli, be, d’une part, et to, de l’autre, seront donc traités comme les marqueurs d’opérations distinctes, qui en fonction des contextes dans lesquels elles s’inscrivent, vont pouvoir être activées conjointement, mais aussi séparément, et apporter ainsi chacune sa contribution à la construction des différentes valeurs sémantiques de la combinaison dans son ensemble.
Cyril Aslanov (Aix-Marseille Université)
Dans un article que notre regrettée Estelle Moline m'avait commandé (Cyril Aslanov, “Les adverbes de manière du latin aux langues romanes,” Scolia - Revue de linguistique, 27 [2013]: 13-29) j'ai évoqué les origines latines de l'adverbe français et je me suis intéressé au fonctionnement de l'adverbe dans son contexte latin. Je voudrais approfondir aujourd'hui cette réflexion sur l'adverbe qui était chère à notre collègue en remontant encore plus loin dans le temps. Je comparerai l'adverbation latine à celle des autres langues italiques et j'essaierai de percevoir dans quelle mesure l'adverbe italique a innové par rapport au legs indo-européen. Cela m'amènera à envisager la question de l'adverbe dans une perspective typologique et à soulever le problème de langues présentant un système adverbial assez différent de celui des langues indo-européennes. J'envisagerai notamment la question des coverbes, équivalents fonctionnels des adverbes d'un point de vue sémantique mais appartenant incontestablement à la partie du discours du verbe si on les envisage d'un point de vue morphologique et syntaxique. Je m'intéresserai également à la distinction parfois malaisée entre adverbes et prépositions (ou post-positions) notamment dans les langues où les post-positions fonctionnent comme des coefficients morphologiques venant préciser une function syntaxique (géorgien; langues finno-ougriennes). Enfin la question des particules modales au contact entre langues sémitiques et langues indo-européennes, notamment dans l'interface entre le hittite et l'akkadien, confirme que la catégorie de l'adverbe transcende souvent les frontières entre les parties du discours au point qu'on est tenté de se demander si l'adverbe est vraiment une partie du discours.